Les résultats du Huffington Post donnent l’exemple dans le secteur moribond de l’information en ligne.
C’est par le biais d’un détour par le blog de l’infatigable Raphaël Benoit (co fondateur de LePost.fr) que je découvre un billet à propos du Huffington Post, célèbre site d’information américain qui bat des records de trafic et de revenus.
Cela fait un bien fou de lire quelque chose de positif à propos de la monétisation des sites d’information.
Lors de mon long séjour à New York en 2008 et 2009, j’avais bien ressenti l’importance émergente du Huffington Post, ce magazine d’information en ligne fondé par Arianna Huffington. C’est aujourd’hui confirmé avec les chiffres partagés par Raphaël qui nous décrit la fabuleuse ascension de ce trublion du marché de l’information en ligne. Puis cela fait quelques jours que je vois passer des informations à propos du Post, me laissant penser que ça tombe à pic avec un départ récent d’une prise de conscience à propos de l’importance du contenu.
La réussite du Huffington Post
Il est toujours étonnant d’observer un acteur d’un secteur chahuté qui s’en sort pendant que les pères spirituelles de la presse écrite sont encore à se regarder le nombril pour comprendre comment marche Internet.
Les piliers de la réussite du Huffington Post semblent aisés à analyser, mais ça devient aussi plus subtile lorsqu’on creuse un peu.
En surface, il est évident que la mise en scène de l’information bouscule à sa manière le marché publicitaire en apportant une valeur ajoutée inespérée qui incorpore des notions qualitatives fortes. Il s’agit d’un contenu gratuit de qualité qui est renforcé par un attrait communautaire délicieux pour l’annonceur.
Parmi les autres éléments favorables au succès du Huff Post, on peut citer le timing parfait (élection d’Obama), les coûts maîtrisés, la technique sérieuse (20% du budget) et un patron performant (Eric Hippeau). Il faut également ajouter l’intelligente utilisation des réseaux sociaux avec une capitalisation puissante sur une communauté qui se traduit par une moyenne mensuelle de commentaires qui dépasse le million. Les milliers de blogueurs et poignées de signatures prestigieuses qui composent la force de frappe du Post sont aussi une valeur sûre indéniable. Au lieu de se braquer contre les blogueurs ou leur donner un strapontin comme LeMonde.fr, la stratégie adoptée par le Huff Post capitalise à fond sur les blogueurs.
Le Huffington Post a tout de même reçu l’appui d’un capital de 5 millions $ en 2006, complété par un 2ème tour de table fin 2008 pour 15 millions de $. Le challenge actuel du Huff Post consiste à s’établir comme valeur sûre au niveau local. Au niveau du tiroir caisse, Qui peut encore dire aujourd’hui que l’information en ligne ne paye pas ? On se rappelle les déboires de Murdoch contre Google News, mais c’est vraiment tout le secteur qui est déboussolé et pendant ce temps le Web avance.
Le négatif
Au niveau des points faibles, le Huff Post est très orienté libéral. C’est un parti pris qui peut poser problème lorsqu’il est poussé trop loin comme c’est arrivé à plusieurs reprises. Quoi que la controverse n’est pas forcément de la mauvaise publicité… tant que ça ne dépasse pas les bornes. En tout cas, c’est courageux de choisir son camp, mais ce n’est pas toujours favorable pour les affaires.
En tout cas, le Post n’est pas à l’abri d’un concurrent qui lui vole la vedette comme cela arrive si souvent sur le Web. Il est vrai que le site d’Arianna Huffington a pris une bonne avance, mais il reste encore à l’adaptation du modèle sur un marché national. Allo-Start-Up.fr ?
Et en France ?
En France, on dirait que Mediapart s’en sort pas si mal avec un modèle payant, mais je persiste à croire que la carte bleue du lecteur comme modèle économique n’est pas la bonne solution.
Le succès du Huffington Post suggère qu’il est possible de réussir à gagner de l’argent en procurant du contenu de qualité gratuitement.
Tout en réfléchissant aux sites d’information que je trouve intéressant, il m’apparaît évident que la liste est bien plus longue qu’on peut penser. Bien sûr que la quasi totalité du Web est de maigre qualité à carrément pourrie. Justement, ça me conforterait encore plus sur les possibilités de percer encore existantes.
En plus, quand on aperçoit les possibilités offertes par l’iPad pour améliorer la mise en scène de l’information, j’envie ceux qui sont dans les starting blocks pour engloutir une part du gâteau. Le secteur de l’information en ligne est loin d’être mort né. Bien au contraire, je crois fermement que c’est un secteur extrêmement favorable à pénétrer. Les ténors de la presse écrite sont embourbés, tandis que les signaux sont nets pour lâcher la bride à ceux qui s’imprègnent du Web plutôt que tourner autour. L’information accélère sa mutation vers le monde digital et l’ancien s’effondre pendant que le nouveau fait ses preuves comme démontre le Huffington Post.
A chaque fois que tu parles d’un site, on apprend qu’il se vend pour des millions dans les semaines qui suivent. Ce billet va t-il aussi être prémonitoire ?
Si oui, tu pourras me prêter ta boule de cristal ? J’ai des idées d’utilisation annexe.
Plus sérieusement, la monétisation de sites de grande audience n’est effectivement pas une chose facile.
Autant, je connais quelques acteurs de niches spécialisés qui engrange quelques revenus en faisant payer des abonnements, autant, comme toi, je ne crois pas à ce système pour de l’info de masse.
Aujourd’hui, il est tellement facile de trouver du contenu gratuit dans le domaine de l’actualité.
J’ai aussi quelques doutes sur la qualité de certains contenus payants. Je pense qu’il y a tout de même un marché, mais les gens ne sont pas forcément prêts à payer n’importe quoi, il faut que le contenu tiennent vraiment la route.
Ok, je ne cracherai pas dans la soupe, mais j’ai quand même des interrogations.
Ce qui me gène vraiment dans ce genre de médias (tu aurais pus citer Rue89 aussi) c’est que le texte est serte unique, mais l’information non elle ne l’est pas.
Cette réécriture est un condensé de ce qu’on trouve dans les journaux qui font eux de l’investigation. Que se passera t’il à la fin? Va t’on vers une info 100% Reuter/AFP?
Je ne suis pas d’accord avec toi, il faut s’inquiéter et pestiférer cette presse. Pour moi les journalistes de métier, ceux qui passent plusieurs jour à écrire un article, ont raison de s’inquiéter, on tue l’information et promulgue l’air du téléphone arabe.
Je citerai Steve Jobs que je n’aime pas particulièrement sauf pour cette vision là:
J’ai pas envie de vivre dans un monde de blogers.
@Sylvain : ah oui comme le poulpe de la coupe du monde 😀
@pagetronic : bien sûr qu’il y a plein de choses à dire du point de vue déontologique, mais j’ai pris l’angle business aujourd’hui. En mettant de côté la notion de qualité, il est intéressant de regarder si on peut vraiment gagner de l’argent avec de l’info gratuite.
C’est Eric Schmidt qui ne veut pas vivre dans un monde de blogueurs. Là aussi y a matière à débattre.
En parlant de l’iPad, ça me parait justement la première initiative sérieuse qui, en plus d’agrandir l’audience de la presse en ligne, pourrait amené à un modèle économique payant, mais je me trompe peut-être. En tout cas oui, si on arrive à trouver un modèle rentable uniquement grâce à la publicité, on ira dans un cercle vertueux où tout le monde s’en portera que mieux 🙂
Et pour les opinions libérales, quand tu parles d’un certain « risque pris », j’ai envie de dire oui et non. Si l’on distingue l’économique du social, amha c’est pas tant des idées libérales que conservatrices qui sont risquées pour les ventes.
Ah oui Jobs c’est « une nation de blogueurs », c’est pareil on dira, j’ai du lire un mauvais blog 😆
J’avais lu avec interet le billet du patron de LePost.fr et je rejoins ton optimisme sur un modele viable pour la presse d’actualite en suivant l’exemple du Huffington Post. D’ailleurs les journalistes d’investigation existent et font un travail de qualite, donc non ce n’est pas que du repompage a la sauce Metro de chez l’AFP ou Reuters !
Faire payer un contenu lié a l’actualité n’est pas une solution que je trouve interessante personnellement, c’est pourquoi je suis heureux de voir que le Huffington Post s’en sort plus que bien.
Faire payer un contenu plus ciblé, technique, graphique, avec de belles photos.. c’est par contre un modele bien plus viable AMHA, et l’iPad est parfaitement adapté a ce type de contenu.
Bref le journalisme est loin d’etre mort et le web sera certainement une revolution aussi puissante et qualitative que l’imprimerie, il faut juste que les « vieux cons » partent a la retraite ou soient mange par les ceux qui dessinent l’avenir avec du reve, de l’esperance et de l’envie, au dela des marges qu’ils peuvent se mettre dans leur poche! Ca prendra un peu de temps, mais comme pour la musique je suis certain que le resultat sera d’autant plus appreciable pour les consommateurs.
@Nicolas : sur iPad, dernièrement j’ai acheté Wired qui m’a vraiment séduit pour l’app bien foutue et le moyen de paiement au numéro.
Ma vision de l’iPad rapidement : ce n’est pas une révolution qui a changé ma vie numérique, mais c’est un excellent produit qui est très agréable à utiliser. Pour la presse, je vois un énorme potentiel concernant la mise en scène de l’information.
@Antonin : comme je viens de souligner, on paye sans souci lorsque l’expérience est satisfaisante. C’est pourquoi j’ai tendance à minimiser le problème souligné par @Pagetronic. On ne peut pas éternellement blouser le chaland. Au bout du compte, on doit s’accorder à la demande. Ça ne rime pas toujours avec qualité.
Ai-je besoin de faire un parallèle facile avec la TV ?
@Sylvain : On peut effectivement penser que le modèle payant n’a pas d’avenir. Mais tout baser sur un système publicitaire est utopiste je pense.
D’ailleurs, et pour reprendre un reportage d’Arte pas plus tard que hier soir, le journalisme d’investigation demande des moyens (plusieurs journalistes, plusieurs jours et autres). Pas sûr que la publicité permette d’amener de gros moyen… à moins d’avoir un gros lectorat. Et honnêtement, les gens sont plus intéressés par Zahia que par le fonctionnement global de Goldman Sachs.
« Je persiste à croire que la carte bleue du lecteur comme modèle économique n’est pas la bonne solution »
Comme modèle économique pour faire toujours plus de pognon peut être, mais pour informer correctement les gens il n’y a pas photo, le modèle payant est beaucoup plus performant grâce à son indépendance.
Je ne pense pas que 20 minutes ou même Rue89 auraient pu sortir une affaire comme l’affaire Bettencourt justement parce qu’ils sont financés par la pub. C’est là ou je trouve l’usage de la publicité très vicieux. Il donne beaucoup trop de pouvoir, y compris le pouvoir de ne pas informer, aux grandes entreprises (qui payent les campagnes de pub).
Et puis toujours le même problème avec la pseudo gratuité financée par la pub. Ca n’a rien de gratuit puisque c’est le consommateur qui finance. Si je donne 10€ à médiapart, ils empochent la somme. Pour que Rue89 gagne 10€ de pub, je serais curieux de savoir combien j’ai été ponctionné lors de mes achats et combien tous les intermédiaires se sont mis dans la poche au passage.
Mais sinon, j’ai jamais rien payé sur leMonde.fr.. pourtant je serai prêt à payer, je pense qu’ils ont déjà pas captés comment vendre leurs abonnements, et google avec son système de micro-paiement (encore lui) va sans doute leurs rendre un grand service !
@Keeg : ça fait plusieurs fois qu’on me parle de ce reportage d’Arte. Va falloir que je regarde ça.
@Risoul : j’aurais dû préciser ma pensée car j’avais en tête justement le modèle MediaPart qui exige une abonnement mensuel. De l’autre côté, j’ai beaucoup moins de réticence avec un paiement au numéro. Par exemple avec ce que propose Wired sur l’iPad.
@PageTronic : oui voilà ! Comme je viens de répondre @Risoul, il faut se pencher sérieusement sur la manière de faire payer en direct.
Je cite encore Wired en exemple, mais ça m’a frappé lorsque j’ai utilisé l’app iPad pour la première fois.
Moi je suis bluffé par la barre en haut quand on visite le site sous GG Chrome, c’est tellement bien pensé… (en gros c’est un push de leur extension GG Chrome, avec une fake barre)
Etude de cas TRES intéressante !
Je reviens sur le cas de Mediapart car je le trouve au contraire pertinent. Edwy Plenel a (été viré) quitté le Monde et a décidé d’appliquer le recette de la presse (print) payante sur mediapart : du contenu de qualité, écrit par des journalistes impliqués et qui font de l’investigation et tout ce qui va avec le métier de journaliste. Si on compare le Monde aux gratuits, le contenu de l’un regorge d’articles de fond et de qualité, alors que celui des autres reste pauvre et survole l’actualité. Attention, je ne dis pas que la presse web gratuite est comparable aux gratuits papier, mais simplement que le modèle « payant=qualitatif » tient la route chez Plenel. En plus sa survie ne dépend que de son lectorat et je trouve cela culotté, dans un monde de pub.
Quel service suplémentaire un journal en ligne s permettrait de donner pour q’un internaute paye?
Abonnement ou rémunération via la publicité, je ne suis pas convaincu que l’information en ligne soit un secteur en croissance dans le temps. Les acteurs du marché déjà présent peuvent faire fructifier leurs investissements précédant, mais des nouveaux venus aujourd’hui auraient à mon avis beaucoup de mal à percer. Entre les blogs spécialisés, les sites communautaires et les sites d’actualités de journaux papiers, il n’y a pas beaucoup de place pour une information brute, sans angle d’attaque particulier. A mon avis, ceux qui veulent pénétrer le marché devraient plus s’employer à trouver un concept différent qui donnerait une réelle plus-value au projet.
Les sites d’informations sont très difficiles à rentabiliser. Mediapart s’en sort pas trop mal, mais néanmoins on se rend compte actuellement qu’ils font du scandale avec l’affaire Woerth ce qui leur fait de la publicité gratuite.
Son PR de 8 vient certainement du million de commentaire dont il bénéficie.
Il a du investir pas mal pour se lancer… ensuite les internautes ont font le reste pour son référencement.